Sainte Agathe à Collet
Texte de Roland Marcoux
Source : Extrait d’une étude faite par M. P. OLIVIER, Curé de St Laurent, étude datée du 31 décembre 1929.
Le 15 octobre 1603 (sous le règne d’Henri IV), a lieu la consécration de la Chapelle de Collet, édifiée par ses habitants et dédiée à Sainte Agathe.
Jeanne POYET, femme d’Antoine RANDIN (vigneron de Collet), décide, par dévotion et pour aider « la réalisation du désir que les habitants de Collet ont de faire célébrer le divin service » d’y faire célébrer annuellement et perpétuellement, une « messe à basse voix ».
La date choisie pour cette messe est le 5 février, jour de la Sainte Agathe : cette messe sera dite par le Curé de Saint Laurent ou son remplaçant.
Pour assurer la pérennité de cette messe, Jeanne POYET verse initialement la somme de 7 livres et 10 sols et s’oblige à payer 7 sols 6 deniers tournois, chaque messe à venir.
A noter que cet engagement concerne Jeanne, bien sûr, mais également ses descendants !
Cet acte est officialisé par Maitre FORISSIER, notaire royal.
Que reste-t-il de cet engagement, 410 ans après ?
A la lettre, pas grand-chose mais dans l’esprit (saint, bien sûr !), l’essentiel est préservé.
Il n’y a plus de messe, faute d’officiant, je ne pense pas non plus que les descendants de Jeanne continuent à verser les 7 sols 6 deniers !
La date du 5 février n’est pas respectée : la date est décidée depuis de très nombreuses années par les femmes de Collet (là, on est bien dans l’esprit) et dépend surtout des vacances scolaires.
La « messe » actuelle (qui n’est d’ailleurs plus une messe) n’est pas une messe basse mais une messe chantée (c’était d’ailleurs le cas quand il y avait un curé).
Il semble, à la lecture des notes du curé OLIVIER, qu’il y ait eu une interruption de l’office pendant les années qui ont suivi la Révolution mais « la tradition de la Messe annuelle pour la fête de Ste Agathe a été reprise par les habitants de Collet qui font la quête entre eux pour fournir l’honoraire de la Messe. »
Mais l’esprit est bien là, quand on songe que plus de 400 ans après, cette tradition existe toujours. Certes, il y a de moins en moins de participants mais c’est la dure loi de la démographie déclinante.
Qu’en sera-t-il dans 400 ans ? On fera le point à ce moment là !
Souvenirs :
La fête de Collet était l’occasion pour les familles de Collet, de recevoir les parents ou amis pour des déjeuners copieux. Aussi, y avait-il beaucoup de monde ce jour, à Collet.
Compte-tenu de la surface exiguë de la chapelle, même en se tassant, il était impossible de faire entrer tout le monde.
Certaines âmes charitables essentiellement masculines, laissaient chrétiennement leur place à des personnes plus enclines à écouter les saintes paroles, à savoir les femmes et les enfants !
Est-ce de là que vient la fameuse phrase : « les femmes et les enfants, d’abord » : je ne puis l’affirmer !
La messe était l’occasion pour tous les participants, de partager une brioche, bénite pour l’occasion et tout le monde (y compris les mécréants) en avalait un petit morceau.
Aujourd’hui (et ce n’est pas une plaisanterie), chaque fois que je mange de la brioche, je repense à ces moments chargés d’émotion et de souvenirs.
Je me souviens des derniers curés de St Laurent (PAIN, CHASSAGNEUX, MONIER), venant dire la messe à Collet, vers midi, après la « grand’messe » qui avait lieu à l’Hôpital ou St Laurent. Après le départ de MONIER, c’est le frère de Thérèse BARJAT, le père MICHEL de Rochefort, qui a assuré l’office pendant un certain nombre d’année mais il lui fallait l’autorisation de la Cure de Boën et cela n’allait pas sans mal.
Le prêtre (à l’exception du père MICHEL qui déjeunait chez sa sœur) prenait son repas dans une famille de Collet, différente chaque année. Après le repas, il rendait visite aux autres familles du village.
Je rajoute un témoignage de mon oncle : « Le soir, il y avait un bal organisé chez Geneix (l’actuelle maison de Michel BARJAT), ou dans le garage du Moulin (actuellement chez MARTIN) et animé, à l’accordéon par Charles GOUTTEFANGEAS (de Chabot), Victor MURAT ou, plus tard par Jeannot BARTHOLIN, de l’Arnaudin. »
A la sortie de la messe, une table était dressée et on pouvait partager le verre de l’amitié. Certains hommes ayant beaucoup d’amis, partageaient plusieurs fois ce « verre de l’amitié », tant et si bien que le retour à la maison d’accueil ressemblait, pour certains à un véritable chemin de croix !
Le tarif des consommations était laissé à l’appréciation des clients : à ma connaissance, il n’y a jamais eu de pertes et les bénéfices étaient (et sont toujours) affectés à l’embellissement de la chapelle.
La chapelle de Collet s’enorgueillit de posséder une statue en bois, représentant Sainte Agathe.
Dans les années 30, cette statue avait été retirée de la Chapelle pour cause d’impudeur : Ste Agathe y est représentée seins nus (son supplice fut d’avoir les seins coupés). Elle avait été provisoirement déposée chez Eugénie MOLLARD (actuellement maison de Pierrot THEVENET). Cette dernière, s’étant habituée à la présence de Ste Agathe dans sa maison refusa de la rendre quand, la vague de puritanisme passée, les habitants de Collet décidèrent de rendre à la Chapelle, sa statue. Il a fallu une énergique intervention de Pierre THEVENET et Jean MARCOUX pour que Ste Agathe rejoigne son logis.
Sainte Agathe
Née au IIIe siècle à Catane en Sicile, dans une famille noble, Agathe était d'une très grande beauté et honorait Dieu avec ferveur et lui avait ainsi consacré sa virginité. Quintien, proconsul de Sicile, souhaitant par-dessus tout l'épouser, fit tout ce qu'il put pour la convaincre mais Agathe ayant refusé ses avances, il la fit jeter en prison et la fit torturer. Parmi les tortures qu'elle endura, on lui arracha les seins à l'aide de tenailles mais elle fut guérie de ses blessures par l'apôtre Pierre qui la visita en prison. D'autres tortures finirent par lui faire perdre la vie et son décès fut accompagné d'un tremblement de terre qui ébranla toute la ville.
Un an après sa mort, l'Etna entra en éruption, déversant un flot de lave en direction de Catane. Selon la légende, les habitants s'emparèrent du voile qui recouvrait la sépulture d'Agathe et le placèrent devant le feu qui s'arrêta aussitôt, épargnant ainsi la ville.
Depuis, on invoque son nom pour se protéger des tremblements de terre, des éruptions volcaniques ou des incendies.
Sainte Agathe est la patronne des nourrices, des bijoutiers, des fondeurs de cloches.